A la demande du Père James Martin (SJ), auteur de « Bâtir un pont, l’Eglise et la communauté LGBT », aux éditions du Cerf, nous avons rédigé ce bref rapport sur la relation en France des personnes homosexuelles et transgenres catholiques avec l’Eglise.
Communauté des personnes Lesbiennes, Gays, Bissexuelles et Transgenres (LGBT). Pour ce rapport, nous avons choisi d’utiliser le sigle LGBT+, ce dernier étant plus inclusif.
Cette relation des personnes LGBT+ avec l’Eglise catholique en France est très différente selon leur âge, leur origine sociale et leur lieu de vie. Par ailleurs, des organisations spécifiques accueillent les chrétiens ou les catholiques concernés par l’homosexualité. De même, certains diocèses français ainsi que des communautés religieuses et quelques prêtres ou religieux (femmes et hommes) sont à l’écoute des catholiques LGBT+.
Rendons hommage également aux églises protestantes de France dont certaines très libérales accueillent les catholiques LGBT+ comme des frères et soeurs. La communauté homosexuelle de France est en pointe pour les relations oecuméniques. La plupart des organisations spécifiques se déclarant d’ailleurs « chrétiennes ».
1 L’âge
1.1 Les plus anciens (60+) se trouvent parfois encore « au placard » même vis-à-vis de leur famille et n’affichent pas toujours leur homosexualité. Ils restent très discrets sur leur orientation sexuelle au sein de l’Eglise catholique et de leurs paroisses.
1.2 La génération des 30/60 ans connaît une plus grande acceptation par la société (concernant notamment la vie de couple) et au sein de leurs familles. Une participation à la vie de l’Eglise catholique ou des engagements ponctuels restent possibles mais le plus souvent dans la discrétion.
1.3 Les jeunes de moins de 30 ans acceptent beaucoup mieux leur homosexualité et ont le désir, pour les croyants, de vivre simultanément leur foi et leur sexualité.
2 La famille
2.1 Dans certaines familles catholiques très pratiquantes, fortement engagées dans leurs paroisses et/ou diocèses et se sentant en grande adéquation avec les positions du magistère sur de nombreux sujets (avortement, contraception, refus du mariage des prêtres, refus du mariage pour tous2, etc.) ainsi que dans celles s’opposant encore aux évolutions consécutives au concile de Vatican II, dites « traditionalistes », des personnes LGBT+ peuvent ressentir une certaine souffrance dans leur relation avec des membres de la famille (parents, frères et soeurs, etc.) qui n’acceptent pas leur orientation sexuelle. L’homosexualité d’un enfant peut être très mal accueillie et des thérapies de conversion (pourtant interdites en France par la loi) lui seront proposées de façon réitérée. Si l’enfant a gardé la foi et désire la concilier avec sa vie intime, sa souffrance pourrait être encore plus grande. Des exceptions notables existent toutefois et des parents, notamment au fil du temps et de l’accompagnement par des associations, vont parcourir un chemin qui leur permettra d’accueillir leur enfant LGBT+.
2.2 Pour les familles catholiques sociologiques (pas ou peu pratiquantes), l’acceptation des enfants homosexuels ne posera la plupart du temps pas de problème. La doctrine de l’Eglise en matière de morale n’étant pas strictement respectée en France par ces familles qui acceptent tout aussi bien la contraception ou l’avortement. De même, les catholiques satisfaits par les avancées du concile de Vatican II dits « progressistes » accueillent généralement assez bien les personnes LGBT+.
2.3 Enfin, des familles non croyantes peuvent ne pas comprendre qu’un enfant LGBT+ vivant sa sexualité sans problème souhaite se rapprocher de l’Eglise catholique. En effet, elles peuvent se demander comment il/elle peut croire aux discours de l’Eglise catholique qui condamne les relations homosexuelles comme étant des « actes intrinsèquement désordonnés ».
2 En 2013, à l’occasion de l’élargissement du mariage civil et de l’adoption aux couples de même sexe, un mouvement notoirement anti-LGBT+ regroupant principalement des associations liées au catholicisme et appelé « la Manif pour Tous » a protesté dans toute la France, organisant d’importantes manifestations contre le projet de Loi auxquelles plusieurs évêques, prêtres et laïcs ont participé.
3 Le lieu de vie
3.1 Grandes villes. A Paris et dans la plupart des villes universitaires, existe la possibilité de concilier, notamment dans certaines paroisses, sa foi catholique et son homosexualité. Les grandes agglomérations permettent une distance physique certaine entre les paroisses et les lieux gays. De même, si la paroisse est éloignée du lieu de vie ou de travail, des catholiques lesbiennes ou gays pourront vivre leur orientation sexuelle et, parfois même, la vivre en couple en respectant cependant une certaine discrétion.
3.2 Dans les petites villes ou les zones rurales, cette situation est beaucoup plus difficile voire impossible à concilier, les membres d’une communauté finissant par tous se connaître.
4 Les lieux d’accueil
4.1 Il faut souligner la très grande importance en France des organisations chrétiennes ou catholiques d’accueil et de soutien des personnes homosexuelles et de leurs proches.
Nous citerons les principales. Leurs sites sont référencés sur Outreach.faith (resources).
Association indépendante créée en 1972, composée de personnes LGBT+ chrétiennes de différentes confessions ou non-chrétiennes, elle se veut être une interface entre les Eglises et la société. Par des activités conviviales, spirituelles et de solidarité, David et Jonathan souhaite que chacune et chacun parvienne à un équilibre dans sa vie.
contact@davidetjonathan.com
L’association propose à toutes personnes catholiques, hommes ou femmes, concernées par l’homosexualité d’avancer humainement et spirituellement dans un climat de respect et de confiance à partir de la situation dans laquelle ils/elles se trouvent et quel que soit leur état de vie (parents, célibataires, couples homosexuels, couples mariés dont l’un est homosexuel, personnes homosexuelles divorcées ou séparées, personnes souhaitant vivre la continence, prêtres et consacrés…).
yves@devenirunenchrist.net
Association de chrétiens principalement catholiques, engagés dans l’Eglise, laïcs et parents de personnes homosexuelles. « La connaissance de l’homosexualité de nos enfants a bouleversé nos vies et nous a amenés à interroger notre conscience, notre amour, notre foi et l’Eglise face à la singularité de nos enfants. Nous témoignons de l’homosexualité au sein des églises domestiques que sont nos familles. ».
contact@reconnaissance.life
Communion d’alliance contemplative oecuménique au service des personnes homosensibles et transgenres, en lien avec des monastères et des communautés de laïcs.
@CommBethanie (Twitter)
4.2 Les groupes de la pastorale familiale des diocèses catholiques
Environ 20 à 30 des 90 diocèses de France ont créé des groupes d’accueil spécifiques pour les personnes homosexuelles. Une première réunion nationale s’est tenue le 11 mai 2022 à la demande de la Conférence des Evêques de France (CEF) qui a missionné un évêque pour suivre ce sujet. Elle a réuni 70 participants représentant environ le tiers des diocèses français, lesquels paraissant intéressés par cette démarche. Plus ou moins actifs, ces groupes rassemblent quelques prêtres et diacres avec une implication plus forte de laïcs. Dans certains cas, des évêques ont adressé des lettres de mission pastorales.
4.3 Enfin, de nombreuses congrégations religieuses et monastères ouvrent leurs portes aux personnes homosexuelles ou transgenres pour des retraites de groupe (souvent en lien avec les associations LGBT+) ou individuelles.
4.4 Au cas par cas, des prêtres ou des religieux (hommes et femmes) peuvent proposer également un accompagnement aux personnes LGBT+ en recherche de spiritualité.
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